La jeune fille soliloque.
Elle dit le moment crucial de sa vie, les derniers instants avant que Forever Valley, hameau de montagne, ne soit englouti par un barrage. Dans la semaine, elle creuse des fosses au jardin du presbytère, où elle garde le père : chercher les morts est son grand projet. Le samedi, elle va aider Massi dans le dancing, ex école-mairie du village en déshérence. Elle y rencontre Bob, douanier stagiaire à la santé fragile.
La jeune fille murmure ce roman d’apprentissage en forme de passacaille, grave et inéluctable. Autour d’elle, les voix du chœur n’endossent aucun rôle exclusivement. Toutes sont la voix unique de cette épopée minuscule perdue dans le paysage. La musique, dans sa ténuité lancinante, est dictée par la précision clinique de son récit, sa neutralité sans vibrato. Guitare, accordéon, saxophone… les instruments sont les échos du dancing qui sera bientôt fermé, ils sont comme les trophées d’une vie qui s’érode et s’abolit.
La phrase de Marie Redonnet avance par petites unités claires, innocentes en apparence. Elle chante une cantilène terrible mais toujours au bord du sourire.
Frédéric Fisbach montre la majesté de la montagne. C’est lui qui sème les chants autour de cette voix du conte si près de notre oreille. C’est lui qui fond en un seul chœur douaniers, bergers, laitières, infirme et entraîneuse.“
Gérard Pesson
Représentations :
25 avril au 20 mai 2000 : Théâtre des Amandiers, Nanterre