Médée, passionnée et meurtrière
Précisément trois siècles après Marc-Antoine Charpentier – qui signe le premier opéra consacré à Médée -, Pascal Dusapin fait sienne l’héroïne passionnée et meurtrière de ses enfants.
Medeamaterial (Matériau Médée), deuxième opéra de Pascal Dusapin, questionne à nouveau la relation intime de la musique avec le chant et avec le texte, en l’occurrence celui de Heiner Müller, saisi au mot près, dans sa langue, l’allemand. Pascal Dusapin, qui n’a pas rencontré le dramaturge allemand, s’est senti libre de donner, grâce à ce long monologue dépouillé de toute action véritable, sa propre lecture du mythe. La partition fait ainsi la part belle aux voix, à la manière de l’opéra baroque : celle de Médée, bien sûr, long et périlleux lamento pour soprano colorature, prolongé et élargi, dans sa partie médiane par un quatuor vocal madrigalisé, celles du chœur ensuite qui donne à l’œuvre sa couleur originale, associé à l’orchestre de cordes. Médée est chez Pascal Dusapin un corps parcouru de spasmes rentrés, libéré par des salves sporadiques et fulgurantes, autour duquel les voix résonnent en écho. Dans un style âpre et expressif, cet art du chant est ici consommé et primordial : il donne à cet opéra sa véritable dimension lyrique, méditative et violente.
Cette production repose principalement sur un désir : restituer le texte, considérer la musique et sa propre dramaturgie qui d’elle-même fait surgir le lyrisme emporté du mythe. Laurence Equilbey, en brillante et fidèle interprète des partitions chorales de Pascal Dusapin, et André Wilms, en compagnon de théâtre de Heiner Müller, comédien rompu à ses textes, étaient alors associés pour la création en France de l’ouvrage.
Représentations :
4 au 15 décembre 2000 : Théâtre des Amandiers, Nanterre
3 octobre 2000 : Opéra, Rouen
23 et 24 septembre 2000 : La Filature, Mulhouse (création en France)